Un groupe d’économistes, mandatés par le ministre des Finances, viennent de publier leur deuxième fascicule sur les finances publiques. En parcourant ce texte, je me suis demandé pourquoi monsieur Bachand avait embauché des économistes qui nous répètent les mêmes mantras que l’on entend depuis plus de 10 ans : il faut rendre les services publics plus performants et ne pas augmenter les impôts mais les taxes.

Pour obtenir davantage de performance du système de santé, ces économistes proposent rien de moins qu’un développement des services privés de santé. Ce serait bon pour le système public car il serait en concurrence et devrait démontrer son efficacité. Comme si la privatisation n’avait pas déjà tracé son chemin dans les services de santé. Sait-on que 30% des services sont privés dans la santé? Ce n’est pas assez?

Comment peut-on sans rire parler d’égalité et de justice tout en développant un système de santé à deux vitesses?

Et maintenant, les taxes. Quant à proposer cette avenue, messieurs les économistes, pourquoi pas des éco-taxes et des taxes sur les produits de luxe? Ça, ce serait courageux, pertinent, efficace!

Vous dites qu’il faut taxer davantage la population et non augmenter les impôts. Je suis d’accord pour ne pas augmenter les impôts de la classe moyenne. Mais les contribuables aux revenus élevés pourraient franchement faire leur part, eux qui bénéficient de tous les services publics et parapublics que le Québec offre à moindre coût qu’ailleurs au Canada.

Et pourquoi ne pas regarder du côté des grandes entreprises, des banques, des compagnies d’assurances? Ces entreprises qui paient des dividendes élevés à leurs actionnaires et des bonus appréciables à leurs dirigeants, ne pourraient-elles pas contribuer davantage à l’effort collectif pour renflouer les coffres de l’État?

Vous aurez compris qu’avec Québec solidaire, je vais m’objecter de toutes mes forces à nous en faire passer une p’tite vite par le gouvernement du Québec. Non aux hausses de tarifs qui vont frapper surtout la classe moyenne, oui à un effort fiscal additionnel pour les grandes entreprises et les contribuables aux revenus élevés.

Votre point de vue (4 commentaires)

  1. Mario Jodoin
    Jeudi 28 janvier 2010 à 19 h 48

    «Sait-on que 30% des services sont privés dans la santé? »

    En fait, c’est bien plus que cela. Le 30 % s’applique au financement des services de santé par les ménages (et parfois les employeurs) : médicaments sous ordonnance (la part non couverte par l’assurance-médicaments), optométristes, dentistes, physiothérapeutes, assurances privées, etc. Nombreux sont les personnes à faible revenu qui espacent les visites chez le dentiste et l’optométriste pour cette raison.

    Les médecins qui font des consultations dans les cliniques médicales sont des travailleurs autonomes, donc du secteur privé. Ils sont payés par l’État (castonguette), mais leurs services sont rendus par le secteur privé. Je ne prétends pas que ce soit nécessairement un drame, mais il faut le souligner, ne serait-ce que pour contredire ceux qui prétendent que le secteur privé est absent des services de santé.

    «Quant à proposer cette avenue, messieurs les économistes, pourquoi pas des éco-taxes et des taxes sur les produits de luxe? Ça, ce serait courageux, pertinent, efficace! »

    En effet, ils veulent taxer l’électricité (hausser des tarifs quand Hydro-Québec fait déjà des profits élevés, c’est une taxe) peu polluante, pendant qu’ils ne proposent aucune augmentation de la taxe sur l’essence qui est une des premières responsables du smog et de la production de gaz à effet de serre.

    «Non aux hausses de tarifs qui vont frapper surtout la classe moyenne »

    Dans leur document, ils parlent toujours de rehausser l’efficacité de la taxation, mais rarement de l’équité. Pourtant, même dans la théorie économique dominante, un système de taxation doit viser les deux, les conflits venant souvent entre ceux qui favorisent l’efficacité au détriment de l’équité ou l’inverse.

    Le seul moment où ils parlent d’équité est pour recommander des mesures, comme le remboursement de la TPS et de la TVQ, pour les personnes à faible revenu qui s’appliqueraient aussi à la hausse des tarifs. Mais ils ne disent rien sur le fait que les grands gagnants seraient les plus riches et les grands perdants les membres de la classe moyenne. Votre remarque est donc tout à fait pertinente.

  2. Danièle Bourassa
    Jeudi 28 janvier 2010 à 22 h 14

    Il aurait fallu diversifier la provenance des économistes. Les solutions auraient fait éclater les mantras néolibéraux.

    Les experts «indépendants» nommés par M. Bachand :

    1- Pierre Fortin : lucide et prof d’économie à l’UQAM

    2- Robert Gagné : Directeur du centre de la productivité et la prospérité, prof à l’institut d’économie appliquée aux HEC

    3- Claude Montmarquette : lucide, prof au département des sciences économiques de l’U de M et président directeur général de CIRANO

    4- Luc Godbout : prof à la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’université de Sherbrooke

    Où sont les représentants des travailleurs, des civils et des démunis? À lire les conclusions de leur rapport, la justice sociale n’est pas très musicale à leurs tendres oreilles. Ils n’ont certainement pas été choisis pour leur vision alternative de la vie en société. Ces gens ne représentent pas grand monde à part une élite de bien nantis. Alors en toute responsabilité sociale, comment y accorder quelque crédibilité que ce soit? Mais ils ont le pouvoir.

    Je vous cite quelques unes de leurs conclusions qui m’ont fait rire pour ne pas en être troublée :

    «Tout prélèvement sur le citoyen - qu’il s’agisse d’une taxe, d’un impôt ou d’un tarif - a un impact négatif sur la croissance économique.»

    Ces chevronnés universitaires ne font cependant pas la ventilation détaillée pour nous faire la démonstration à qui cette croissance profite.

    Plus loin, ils ajoutent : «Cet impact est cependant variable, selon la nature du prélèvement effectué par l’État.»

    Le mot clé est «variable». Ils nous font la démonstration dans leur paragraphe intitulé «Le caractère dommageable des impôts sur le revenu», que le prélèvement des impôts a l’impact le plus néfaste sur la croissance économique et la création de la richesse. Notez le superlatif.

    Par cette entourloupette de logique 101, ils n’ont pas l’audace de recommander impérativement la modification des lois fiscales qui favorisent injustement les bien nantis. Autant des particuliers que des corporations…..donc, chers concitoyens, parole d’économistes, il faut objectivement regarder du côté des taxes et des tarifs. Ça fait mal aussi, mais moins. De plus, comme valeur ajoutée, les taxes sont moins «sujette à l’évasion fiscale»

    Chers démunis ne vous inquiétez pas, on pense à vous même si vous n’êtes pas représentés sur le comité des experts :

    «Les taxes à la consommation comportent un inconvénient : appliquées de manière uniforme, elles frappent plus durement les plus démunis. Il faut donc les accompagner de mesures permettant de protéger les citoyens les plus pauvres – tels la détaxation des produits et des services de base et le crédit d’impôt TVQ.»

    Vous voilà rassurés.

    Alors si les riches ne font toujours pas leur part et que les démunis sont «protégés», il reste la classe moyenne qui devra payer pour les 2 bords. Elle paie d’ailleurs déjà depuis plusieurs décennies. The show must go on. Jean James Charest y veille.

    Plus loin pour nous attendrir, ils philosophent :

    «Une exigence : ne pas accroître les inégalités. Il faut en même temps – et cela est essentiel – éviter que le recours à la taxe à la consommation n’alimente les inégalités au sein de la société.

    Les exemples venus notamment de Suède démontrent que l’on peut y parvenir,grâce à des programmes de dépenses et de transferts en faveur des personnes à faible revenu. On peut ainsi recourir plus fortement aux taxes à la consommation,sans pour autant avoir davantage d’inégalités du revenu, en misant sur nosprogrammes de redistribution.»

    C’est tout de même une belle pensée sociale-démocrate. Reste à voir si et comment Jean, notre honorable premier ministre, va l’appliquer.

    Une autre perle :

    «Les avantages de la tarification. La tarification favorise les bons comportements (…) En l’absence d’un prix assumé par l’utilisateur, on assiste souvent à une surconsommation ou à un gaspillage du bien ou du service. L’exemple de l’eau et de l’impact de sa non-tarification est très éclairant à cet égard.»

    J’ai en mémoire l’exemple d’un «bon comportement» d’un père de famille qui a donné une volée à son fils pcqu’il a tiré la chaîne, geste rationné par les tarifs élevés de consommation d’eau. Démagogique? P-e bien, j’ai le droit, c’est de ma classe sociale. Reste que la privatisation des services essentiels a des effets pervers innombrables partout où ils ont été expérimentés à travers la planète.

    Pour répondre à votre question Mme David, qui doit payer? Ça devrait être tout le monde dans sa juste part, mais qui va payer?

    Si le lecture des documents vous intéresse :

    http://consultations.finances.gouv.qc.ca/media/pdf/le-quebec-face-a-ses-defis-fascicule-1.pdf

    http://consultations.finances.gouv.qc.ca/media/pdf/le-quebec-face-a-ses-defis-fascicule-2.pdf

  3. Richard Langelier
    Vendredi 29 janvier 2010 à 22 h 12

    Lorsque Claude Castonguay a présenté sa proposition de super-cliniques médicales privées financées par la RAMQ à l’émission «Maisonneuve en direct» à RDI, il a «patiné» pendant toute l’émission avant d’admettre que les économies viendraient du fait que les infirmières ne seraient pas syndiquées. Les conseillers choisis par le ministre Bachand reprennent cette ode au secteur privé. Ils s’émerveillent devant le financement public du secteur privé de l’éducation qui laisse les élèves en difficulté au secteur public sous-financé. Décidément, qui choisit son conseiller choisit son conseil.

    Karl-Pierre Péladeau vient de lancer une charge d’un autre âge contre le syndicalisme. Les conseillers de M. Bachand oublient le paradoxe de l’épargne souligné par Keynes: «Quand tout le monde épargne, tout le monde s’appauvrit». Le New Deal de Roosevelt, la redistribution du pouvoir d’achat, tout particulièrement les dollars vitaux accordés aux travailleurs au salaire minimum, à l’amélioration du filet de sécurité sociale, le renforcement du Code du travail pour permettre aux travailleurs qui veulent se syndiquer de le faire, tout cela semble inconnu des conseillers du ministre, alors que ces dollars vitaux sont dépensés localement.

    À la page 71, «En taxant le travail, on diminue l’incitation à travailler et on décourage les travailleurs qui le désirent à ajouter à leur prestation de travail». Bien évidemment, tout le monde sait que les personnes qui ont des revenus de travail de 200 000$ par année travaillent plus fort que les autres. Quant aux sans-travail, ce sont des paresseux de la pire espèce. Le marché pur fait une distribution équitable des richesses.
    Faut-il pleurer, faut-il en rire
    Je n’ai pas le coeur à le dire
    On ne voit pas le temps passer
    (Jean Ferrat)

    La rémunération à l’acte médical (p. 36) nous est présentée comme modèle d’efficacité. Les médecins de l’Hôpital Ste-Justine l’ont critiquée parce qu’examiner un enfant nécessite plus de temps qu’examiner un adulte.

    La faiblesse du discours alternatif
    Pauline Marois a vu dans ce fascicule des pistes intéressantes, en ce qui concerne l’administration des services de santé. C’est peut-être vrai, je ne lui demande que des exemples précis. Cependant, lorsque le gouvernement Bouchard a décidé d’équilibrer les finances publiques (objectif louable pour les dépenses courantes, sauf en période de récession), il a obligé des travailleurs sociaux qui s’occupent de patients psychiatriques à le faire pour deux hôpitaux. Déjà, lors de la Commission Rochon au début des années 90, un mémoire évoquait le syndrome des portes tournantes. Une personne est hospitalisée en urgence psychiatrique. Si le travailleur social ne réussit pas à faire une entente avec le concierge, la personne sort de psychiatrie après 3 semaines. Le concierge a loué la chambre à quelqu’un d’autre. Elle ne peut faire une demande à l’aide sociale puisqu’elle n’a pas de domicile fixe. Elle ne peut louer une chambre puisqu’elle n’a aucun revenu. Elle fait une nouvelle crise ou va errer au centre-ville où elle échange ses anxiolytiques contre de l’alcool. Les conditions gagnantes du gouvernement Bouchard ont empiré ce problème. Le Parti québécois a une longue pente à remonter pour être crédible en matière de justice sociale.

    Québec solidaire a choisi de rassembler les personnes qui interprètent la réalité selon les contes du prof Lauzon, selon Trotski et les personnes qui croient au modèle économique inclus dans la Déclaration de principes.
    Le résultat est un désastre pour ceux qui essaient de défendre ce modèle.

    Le Collectif pour un une loi sur l’élimination de la pauvreté avait créé une mobilisation extraordinaire. La loi 112, intitulée «loi pour contrer la pauvreté et l’exclusion sociale» par le gouvernement péquiste, a été adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale. Il n’y a pas eu de plan de lutte à la pauvreté dans le budget Marois. Le gouvernement Charest n’a guère fait mieux. Malheureusement, le Collectif (devenu) pour un Québec sans pauvreté a choisi de lancer une pétition où la rigueur intellectuelle est absente. Le Collectif demande au gouvernement de la province de Québec de faire en sorte que les protections publiques soient haussées et ajustées annuellement pour assurer à toute personne un revenu au moins égal à la mesure du panier de consommation, soit 13 267 $/an (2007), afin de préserver sa santé et sa dignité

    J’ai écrit à collectif @ pauvrete.qc.ca. J’ai voulu savoir si c’était 13 267 $ par conjoint, si le texte de la pétition signifiait que le gouvernement du Québec accorderait ce montant au conjoint d’une personne qui a eu un revenu de 100 000$ au cours de l’année, si une personne qui reçoit 3 267 $ d’intérêts sur un montant de 100 000$ recevrait chaque année 10 000$ du gouvernement de la province du Québec. On m’a répondu qu’il n’y avait pas consensus au sein du Collectif, mais qu’on n’était pas allé dans les détails pour la pétition. J’ai évidemment refusé de signer cette pétition qui peut signifier une chose et son contraire.

    On me demandera ce que je propose. Je n’ai pas le charisme ni l’implantation de Françoise David. Je propose la rigueur intellectuelle. Dans la série Duplessis, Denys Arcand faisait dire à Paul Gouin de l’Action libérale nationale qui réalisait que Duplessis avait trompé les opposants à Taschereau: «Nous écrirons des articles dans une revue qui sera lue par quelques centaines de personnes, quelques interventions à la radio à l’heure où tout le monde est couché…».

  4. Jocelyn Roy
    Dimanche 31 janvier 2010 à 12 h 45

    Les québécois de tous horizons peuvent saisir cette occasion pour faire entendre leur voix, exprimer leurs inquiétudes et partager leur vision de l’avenir. Il n’y a pas de consensus sur le comment mais il y en a un sur le pourquoi: réduire la dette, réduire le coût de la prestation de services, améliorer la gestion administrative de nos institutions, revoir la fiscalité… Un aspect est cependant négligé dans l’approche du gouvernement actuel: la possibilité d’augmenter les revenus de l’état sans taxer l’essentiel. Si tous les québécois se serrent les coudes, les plus riches pourraient également faire un effort, ne serait-ce que temporaire (révision des avantages fiscaux pour les 5 prochaines années par exemple). Voilà un projet collectif pour les québécois: mettre de côté les divergences et s’entendre sur des mesures équitables qui permettront de s’attaquer au déficit tout en préservant notre patrimoire.

    Bien hâte de vous entendre mercredi soir.

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